The Australian : Les griffes du dragon

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11 Juin 2005

CHEN Yonglin, le diplomate Chinois en fuite, est un homme profondément effrayé. Il m’a dit qu’il pensait que lui et son épouse, Jin Ping, ainsi que leur petite fille incroyablement mignonne de six ans, Fang Rong, courent le risque d’être kidnappés par des agents Chinois.

Je suis effrayé d’une telle force [ les agents Chinois]’’, a dit Chen. ‘’Ils peuvent faire n’importe quoi contre moi. Les dissidents chinois en Australie sont en danger, c’est très possible. Je crains pour ma vie. Elle a été menacée.’’

Cela peut sembler tiré par les cheveux mais l’enlèvement a été un motif récurrent dans la vie de Chen. Retour en 1971, lorsque Chen avait juste trois ans, durant l’apogée de la démence de masse sous la révolution culturelle Chinoise, le père de Chen a été enlevé par les Gardes rouges, maintenu sous un escalier et battu à mort pendant plusieurs semaines.

Lorsque Chen a tenté de passer en Australie le 26 Mai, une des pièces d’information qu’il amenait avec lui était l’allégation que les agents Chinois avait kidnappé un étudiant Chinois, Lang Ming, en Australie en 2000 puis l’avaient ramené en Chine pour forcer le père de l’étudiant, un ancien vice maire de Xiamen, à retourner en Chine pour faire face aux accusations de détournement de fonds.

Cela aussi semble un peu gros et bizarre, mais l’enlèvement de la progéniture pour forcer les parents, spécialement les transfuges, a une longue histoire dans l’espionnage Soviétique et Chinois.

À au moins une occasion, un citoyen australien a été kidnappé par les agents Chinois. Un homme d’affaires australien, James Peng, a été emmené de son hôtel à Macau tard dans la nuit en Octobre 1993, ramené de force à la frontière de Chine ( Macau n’est pas revenu à la souveraineté Chinoise avant 1999) et maintenu en prison sur des accusations commerciales pendant six ans, jusqu’à ce qu’il soit finalement innocenté par la justice de Hong Kong.

Ce qui est le plus remarquable dans le cas de Chen, est peut-être que maintenant, plus de deux semaines après qu’il ait pris un avion pour s’enfuir du consulat chinois à Sydney, personne d’aucune agence gouvernementale Australienne ne l’a interrogé sur ses allégations. Chen a aussi déclaré qu’il savait que 1000 agents Chinois et informateurs travaillaient en Australie. Il n’est pas nécessaire de donner foi à ces allégations si l’on veut enquêter.

Cette semaine, j’ai eu la chance d’interroger longuement Chen. Nous étions assis dans une salle de conférence avec son épouse et son enfant et un homme de haute taille […] du mouvement Falun Gong. Un ami a préparé des cappuccinos pour chacun, mais Chen dans son costume impeccable et ses lunettes d’intellectuel, était trop nerveux et agité pour toucher le sien, jusqu’à la fin de notre interview.

[...]

Chen m’a parlé de son premier voyage au bureau de Sydney du département de l’immigration et des affaires multiculturelles et indigènes le 26 Mai : ‘’ J’ai demandé à voir le directeur d’état [de l’immigration]. Je lui ai dit que j’étais du consulat Chinois et que le problème était extrêmement important, inhabituel et sensible. Je leur ai montré mon passeport et mon identification diplomatique. Je leur ai spécialement demandé de ne pas appeler le consulat Chinois. Ils ont appelé le consulat sans me le dire, puis ont transféré l’appel sur mon téléphone mobile.

Naturellement Chen s’est enfuit. Avec cette seule erreur colossale, le département de l’immigration a probablement enlevé au gouvernement toute chance de traiter la question calmement. Il y a de la part du gouvernement un sentiment que cette maladresse de l’immigration a diminué les options du gouvernement et contribué à ce que le gouvernement passe pour stupide. Chen a dit que durant ses quatre années au consulat de Sydney, son principal travail était de surveiller le mouvement spirituel Falun Gong, ainsi que les activistes pro démocrates et les sympathisants de Taiwan, de l’indépendance du Tibet et de l’indépendance du Turkestan oriental.

Les sources fiables indépendantes de Chen ont révélé à l’Inquirer que les priorités des services secrets Chinois en Australie sont : La compétition avec Taiwan pour l’influence au sein des communautés ethniques Chinoises ; la surveillance et le harcèlement des mouvements tels que Falun Gong, que Pékin considère comme hostile ; le vol des secrets militaires et de haute technologie. (Voir histoire ci jointe.) Une grande quantité d’efforts quotidiens pour surveiller les Chinois visitant l’Australie pour affaires, tourisme ou pour leurs études.

Traditionnellement, le vaste effort des services secrets chinois n’était pas organisé initialement via ses ambassades et ses consulats mais par des sociétés et des individus. Cependant, ces dernières années, l’espionnage Chinois a été davantage organisé depuis les ambassades et les consulats, et ce sont les endroits d’où on pense que les actions les plus sérieuses ont lieu.

Surveiller la communauté Chinoise locale peut être sérieux si cela mène au harcèlement ou à la persécution des membres de la famille en rentrant chez soi. Des sources fiables ont dit à l’Inquirer que les agents Chinois ne tentent pas seulement de perturber les activités de Falun Gong mais, par l’utilisation d’agents perturbateurs, tentent aussi de les rendre violentes.

On appelle de telles activités des influences étrangères déplacées. À au moins deux occasions distinctes, le département des affaires étrangères et du commerce s’est plaint, ou a semoncé les diplomates Chinois pour les activités du gouvernement chinois parmi la communauté chinoise australienne. Une fois, ce fut en 1999 et l’autre, la semaine dernière. L’histoire de Chen surveillant et harcelant Falun Gong et d’autres groupes activistes en Australie a été renforcée cette semaine par le témoignage d’un autre dissident, Hao Fengjun.

Hao interviewé par la télévision ABC a dit qu’il travaillait pour une agence de sécurité Chinoise appelée 610, qui a reçu de volumineux rapports sur les Chinois australiens. Lui non plus, n’a pas été interrogé par l’ASIO ou la police fédérale Australienne.

Chen a dit qu’il n’avait personnellement dirigé aucun des prétendus 1000 agents et informateurs en Australie mais qu’il connaissait leur existence, grâce à l’accès qu’il avait aux fichiers informatiques du grand établissement diplomatique Chinois.

Il ne sera pas précis quant à l’origine et l’étendue de ce qu’il sait du prétendu kidnapping qu’il a décrit, excepté pour dire qu’il l’a découvert, alors qu’il travaillait au consulat et dont on lui a dit qu’il émanait d’une ‘’ source fiable’’.

Chen m’a dit qu’il en est venu à haïr son travail: ‘’ J’ai été instruit par mes supérieurs à surveiller Falun Gong et les mouvements pro démocratie, et obtenir des informations de la communauté et des amis qui me contactent, quelle qu’’en soit la source. J’ai lu leurs publications et suis allé à leurs rassemblements.

‘’Mais en réalité, je soutiens la démocratie, je leur ai parlé et je les ai trouvés très amicaux envers moi. J’ai dois faire des rapports sur eux en Chine, et je me sens coupable parce que cette information peut être utilisée contre eux et leurs familles.’’

Chen dit qu’il avait connaissance de quelques familles d’activistes démocratiques ayant souffert en Chine. De nouveau, il est impossible de rejeter sur le champ ses accusations. Un rapport sur les droits de l’homme du département d’ Etat américain, publié en février, déclare que 250,000 à 310,000 prisonniers sont maintenus dans les camps de travail et de re-éducation Chinois. Le rapport dit : ‘’ Le gouvernement continue à commettre de nombreux et sérieux abus. Les autorités ont été rapide à supprimer les groupes religieux, politiques et sociaux [opposés au gouvernement]. ‘’

Tout en insistant sur le fait que beaucoup de catégories de personnes sont persécutées en Chine, le département d’état commente plus longuement: ‘’ Le gouvernement continue sa persécution contre le mouvement spirituel Falun Gong et des dizaines de personnes restent incarcérées dans les prisons, sont soumises à la re-éducation extrajudiciaire dans les camps de travail et les institutions psychiatriques. Plusieurs centaines d’adhérents de Falun Gong sont, paraît-il, décédés en détention à cause des tortures, des abus et de négligence… depuis 1999.’’

Ce contexte donne au travail de Chen de faire des rapports sur les gens en Australie une dimension morale bien sombre. On a demandé à Chen de mettre les noms des personnes sur une liste noire. Ceci pourrait signifier qu’il leur est interdit de voyager en Chine pour voir leur famille. Les chinois sur la liste pourraient voir leurs passeports confisqués lorsqu’ils viennent pour les renouveler, une action qui menace leur capacité à fonctionner normalement en Australie. Chen a souvent discuté avec ses supérieurs au sujet de la pratique de confisquer les passeports.

Avant de venir en Australie, je ne connaissais rien de Falun Gong,’’ a t-il dit. ‘’ J’ai trouvé qu’ils étaient des personnes innocentes qui avaient besoin d’aide, pas de persécution. Chaque jour, mon supérieur me disait, ‘ Ici, c’est Falun Gong’ ou ‘ Ici, c’est le mouvement pro-democratique, trouvez des moyens pour les attaquer.’ Ils m’ont force à faire ça.’’

‘’ Je suis comme une machine ou un chien, que n’importe qui peut appeler. Ainsi, mon esprit a été torturé et tordu. Je sens que ma conscience a été tellement érodée qu’au moment où je ne l’ai plus supporté, je suis parti.’’

" Même avant de partir, Chen pensait qu’il serait persécuté s’il retournait en Chine: ‘’ Vous voyez, j’ai aidé des pratiquants de Falun Gong et ils [le gouvernement chinois] le sauront.’’
Maintenant, après avoir tenté de déserter, il pense que son traitement en Chine serait très sévère s’il était forcé de rentrer. Il a rejeté complètement les assurances de traitement indulgent de Fu : ‘’ Si je retourne en Chine, je serai certainement sérieusement persécuté.’’

Même en Australie, si on lui accordait un visa de protection, Chen ne se sentirait jamais entièrement en sécurité: ‘’ Ma vie a été menacée ; nous pouvons endurer le même sort que le cas de kidnapping que j’ai décrit.’’

Chen a dit que sa ‘’ conscience contre le parti communiste’’ peut remonter à son enfance et la mort de son père : ‘’ Ma mère a travaillé très durement pour élever les enfants et m’a encouragé à travailler dur pour qu’un jour, je puisse soutenir la famille.

‘’ Entrer à l’université est un moyen pour accomplir cela, pour assurer le bol de riz. J’ai étudié très dur et en même temps, je travaillais chez moi avec ma mère pour élever les chèvres et les poissons, aller aux champs pour le bois de chauffage. Nous avons expérimenté beaucoup d’épreuves.’’

Puis est venu 1989 et le massacre de Tienanmen : ‘’ Je me suis joint aux parades pour la démocratie et j’ai été témoin des massacres. Trois de mes camarades d’écoles ont été blessés, dont un, gravement avec une balle proche du cœur. J’ai été très choqué. Mais en 1989, le pensais que le gouvernement communiste s’effondrerait en moins de 10 ans.’’

C’était une croyance commune à l’époque, ainsi Chen a saisi l’opportunité de rejoindre l’élite du ministère des affaires étrangères. Son premier poste à l’étranger était Fiji, de 1994 jusqu’en 1998, la question principale étant la compétition diplomatique de la Chine avec Taiwan.

Chen est explicite dans sa politique : ‘’ Bien sur, les Chinois veulent la liberté et la démocratie.’’ Pour toute sa détermination, et les profondes responsabilités qu’il a endossées pour sa femme et sa fille, si vous passez du temps avec Chen, vous serez frappé par sa jeunesse, et l’espèce d’innocence qu’il dégage, même après tout ça.

Est-il un excentrique solitaire, un romantique embarqué dans une grande folie ? Où est-il, peut-être, le futur de la Chine ?


Traduit de l’anglais:


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