Pour avoir confisqué et falsifié son courrier, Li Xifu a poursuivi son bureau de poste dans la province Shanxi (nord de la Chine). Sa plainte a été entendue le 9 novembre devant une cour du district. Pourtant neuf jours plus tard, la police a fait irruption dans la maison de l'ouvrier retraité, l’envoyant directement en centre de détention, sans dû procès.
Qu’un retraité de 74 ans fasse appel à la justice pour rétablir l’exercice de ses droits en a été de trop pour la branche du Bureau 610 du Heilongjiang (province du nord-est de la Chine).
Le 16 novembre, cette agence semblable à la gestapo, que le Parti communiste chinois n’a jamais légalisée, a adressé une note de service. Ce document a été envoyé aux différentes entités étatiques ainsi qu’au Comité du Parti du Heilongjiang. Cette note de quatre pages portent les inscriptions " urgent " et "confidentiel", soit le deuxième plus haut niveau de sécurité de l’information en Chine.
Le document souligne le cas de "Li Xifu, membre obstiné du Falun gong "et sa tentative " fourbe" de "faire usage des canaux légaux pour atteindre des objectifs illégaux", en faisant référence à l’enregistrement de sa plainte contre l’ancien dirigeant Jiang Zemin. Ceux qui ont déposé de telles plaintes, stipule la note de service, sont " entrés en guerre légale " avec le Parti. Le Parti devrait " résolument se prémunir contre ce développement" et même de manière proactive " le tuer dans l’œuf ".
Mais les avocats en Chine avancent que la branche du Bureau 610 du Heilongjiang n’a aucune autorité légale pour envoyer de tels ordres à d’autres entités du Parti, tandis que Li Xifu a agi en respectant les lois du régime chinois.
Cette note de service est un récent exemple des tentatives du Bureau 610 pour arrêter le nombre croissant de pratiquants de Falun gong qui utilisent les canaux légaux du régime pour poursuivre en justice l’ancien dirigeant.
Zhang Zanning, avocat et conférencier en droit à l’Université du Sud-Est de Nanjing (ou Nankin), s’est confié à Epoch Times à propos du Bureau 610. Selon lui, cette agence est limitée à l’émission de ses ordres aux membres du Parti. Mais ses ordres ne peuvent pas être exécutés s’ils sont non-constitutionnels.
" Donc, n’importe lequel de ses ordres ou instructions à l’attention des entités gouvernementales n’a aucun statut légal. Ils sont tous non-constitutionnels ou illégaux", argumente Zhang.
Des plaintes pour crime contre l’humanité et génocide
Les pratiquants de Falun gong s’exercent à des mouvements lents et méditatifs, associés à un enseignement basé sur les principes de vérité, compassion et tolérance. En juillet 1999 le dirigeant chinois de l’époque, Jiang Zemin, a lancé une persécution dans le but d’éradiquer la pratique de Chine.
Minghui.org, un site d’information sur la persécution, a eu la confirmation des décès de plus de 3.900 pratiquants, morts de torture. Mais il est plus vraisemblable que le nombre de victimes soit bien plus élevé, du fait de la difficulté de révéler les informations à l’extérieur de Chine. Des centaines de milliers d’autres sont toujours incarcérés, selon Minghui.
Des investigateurs prétendent aussi que depuis le début des années 2000 le régime serait responsable d’un trafic d’organes. Les prélèvements auraient eu lieu sur des dizaines de milliers de pratiquants de Falun gong, afin d’alimenter un marché de la transplantation, qui aurait servi de nouvelle manne financière du régime.
Cette année, plus de 200.000 pratiquants de Falun gong ont enregistré des plaintes appelant le régime chinois à poursuivre Jiang Zemin en justice, pour crime contre l’humanité et génocide.
Après une réforme judiciaire en mai, assouplissant les conditions de recevabilité des plaintes, la plus haute instance judiciaire du régime à Pékin a dû émettre un important volume d’accusés de réception de plaintes.
La réponse de Pékin à ces plaintes de crimes marque un tournant significatif. En août 1999, deux pratiquants (Zhu Keming et Wang Jie) avaient été arrêtés après leur déposition de plainte contre Jiang. Zhu est resté cinq ans en détention et a eu presque toutes ses dents d’arrachées sous la torture. Wang n’a pas survécu à la prison.
Des réactions provinciales
Les autorités provinciales du Parti semblent avoir adopté différentes attitudes envers la vague actuelle de poursuites. Certaines provinces semblent laisser tranquille les plaignants, tandis que d’autres – en particulier Gansu, Harbin, Shanxi et Heilongjiang – ont éliminé les tentatives de poursuite des pratiquants, même accompagnés d’avocats.
Les autorités du Heilongjiang se montrent particulièrement hostiles aux pratiquants qui ont déposé des plaintes pour crimes. Dernièrement, Sheng Xiaoyun, la belle-mère de Ben Hedges qui est journaliste et présentateur apprécié aux États-Unis, en a fait les frais. Le journaliste a alors demandé à ses spectateurs de téléphoner aux officiers de police responsables de son arrestation. Elle a été relâchée au bout de 10 jours.
Cette rude sentence à Heilongjiang n’est pas une surprise. Davantage de pratiquants de Falun gong ont été tués dans cette province plus que dans toute autre, d’après Minghui. Seules les provinces Hebei et Shandong ont dépassé à elles deux Heilongjiang, totalisant 10.502 cas de persécution.
La branche du Bureau 610 à Heilongjiang tente de pousser les autres entités du Parti à participer à la persécution contre le Falun gong. Dans ce cas, il ne serait alors pas le seul pointé du doigt si un jour la persécution prend fin, déclare à Epoch Times Yu Wensheng, avocat de défense des droits de l’homme en activité à Pékin.
" En fait, poursuivre Jiang, ou n’importe quelle organisation, est légal et fait partie des droits des citoyens chinois", affirme-t-il.
Le Bureau 610 de Tianjin a récemment émis un ordre similaire à celui du Heilongjiang, qu’a pu se procurer Epoch Times. Dans le même registre, ce document demande de : " renforcer le combat contre les excessives plaintes mensongères du Falun gong ".
Il est difficile de savoir si ces notes de service indiquent que les branches locales du Bureau 610 tentent de manière proactive d’étouffer les poursuites, ou si elles reçoivent des consignes du Bureau 610 du Parti central.
Version anglaise :
In Northern Province, China’s ‘Gestapo’ Seeks to Implicate Others in Persecution
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