Le sens profond de la danse classique chinoise

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L'affiche informant du concours international de danse classique chinoise (La Grande Époque)

07-07-2007 - Le premier concours international de danse classique chinoise a lieu cette semaine à New-York. Organisé par la télévision New Tang Dynasty en partenariat avec La Grande Époque, ce concours a pour objectif «de promouvoir la danse classique chinoise, d’approfondir la compréhension de la culture chinoise dans la société occidentale en offrant une plateforme pour la communication interculturelle». A l’instar de nombreuses autres disciplines traditionnelles chinoises, la danse est imprégnée d’une profonde compréhension de la relation entre l’homme, l’esprit et l’univers.

Les arts apportent un sens à la vie des individus. Ils tiennent un rôle important dans l’établissement des valeurs morales de l’humanité et c’est une des sources qui permet à l’homme de trouver des éléments de réponse aux questions fondamentales de sa vie.


C’est ainsi que les arts influent sur les valeurs humaines et parfois, ce sont les valeurs humaines qui influent sur les arts.


Depuis l’antiquité, la musique est l’un des arts qui a le plus marqué la société. Ceci est peut-être dû à son caractère universel qui la rend plus accessible à toutes les classes sociales tandis que les autres formes artistiques comme la peinture ou la sculpture, ont tendance à être plus recherchées par certains milieux socioculturels ou par des élites.


Confucius observait il y a 2 500 ans que cette forme d’art reflétait les valeurs sociales : «Rien de tel que la musique pour améliorer les us et coutumes». Il dit aussi : «La musique est la sublimation de la moralité».


Accompagnant la musique, la danse peut aussi influer sur les structures mentales et morales d’une personne. «On peut connaître les principes et valeurs d’une personne en la voyant danser», souligne Confucius.


À une plus grande échelle, on peut connaître les principes de toute une société à travers la danse.


La danse traditionnelle chinoise: la danse de la «Terre Divine»

Dans l’antiquité, la Chine était appelée la «Terre Divine», cela vient de 5 000 ans de culture portés par une profonde compréhension de la relation de l’homme au cosmos et à la conviction que l’être humain a une origine divine qu’il doit retrouver. Cette caractéristique se retrouve bien sûr dans tous les aspects de la société chinoise antique de l’architecture jusqu’à l’agriculture, en passant par la science et les arts ; la danse n’y fait pas exception.


Afin de mieux comprendre la profonde signification de la danse classique chinoise, La Grande Époque a rencontré Vina Lee, chorégraphe et danseuse principale de la Compagnie de Représentation des Arts Divins qui est à ce jour, la seule compagnie de danse classique chinoise ressuscitant les valeurs traditionnelles dans ses représentations.


Cette compagnie est née aux Etats-Unis. Elle est en tournée dans les principales villes du monde avec son spectacle du Nouvel An chinois. Vina commente :


«La danse chinoise met en phase les mouvements corporels avec les connotations gestuelles. Elle exprime une caractéristique fondamentale de la culture traditionnelle chinoise qui consiste à unir la gestuelle et l’esprit. L’esprit dirige le mouvement et les mouvements reflètent l’esprit. C’est ainsi que pour pouvoir transmettre l’esprit par le biais du mouvement, un danseur doit s’entraîner rigoureusement, aussi bien sur le plan physique que spirituel car les mouvements doivent non seulement être justes et précis, mais aussi être capables de faire passer l’esprit. Il faut que les danseurs aient un état d’esprit semblable et qu’ils soient capables de laisser l’esprit seul guider les mouvements, pour maîtriser chaque partie du corps avec précision. Tout en perfectionnant leur corps physique et leurs aptitudes, les danseurs doivent aussi forger leur caractère moral et leur force de volonté».


La technique

Les caractéristiques de la danse classique chinoise sont l’élégance et la noblesse. Les mouvements fondamentaux mettent l’accent sur les bras, les yeux, le corps, le travail des pieds et la coordination. La coordination s’emploie à harmoniser les bras, les yeux, le corps et les pieds. Pour réaliser une danse chinoise, on doit être expert et habile sur tous ces points. Les mouvements doivent être fluides, gracieux et agréables à voir.


« Une danseuse doit être comme une fleur de lotus glissant sur l’eau. Elle doit avoir une silhouette droite et noble, telle une tige de fleur de lotus. Cependant, les gestes doivent apparaître naturels et sans effort. Un danseur doit marcher sur la pointe des pieds vers l’extérieur, les genoux légèrement fléchis », explique Vina.


La danse classique chinoise est différente du ballet occidental. Le ballet met l’accent sur les lignes tandis que la danse classique chinoise insiste sur l’harmonie et le mouvement circulaire. Par exemple dans une position typique de la danse chinoise appelée «les doigts d’orchidée», les doigts sont légèrement arqués et les épaules quelque peu fléchies. On ne verra pas un danseur maintenir les bras tendus à moins qu’il exprime un acte condamnant une personne.


Bien que les techniques soient différentes, la danse classique chinoise, comparée au ballet classique occidental, est une discipline très exigeante qui requiert une grande préparation. On retrouve dans la danse chinoise certains exercices similaires à ceux du ballet comme les exercices sur barre ou au sol. Cependant, les méthodes basiques d’expressions diffèrent : en effet, une danseuse de ballet occidental étire la ligne de son corps. À l’inverse, la danse chinoise exprime les lignes de différentes manières. Les danseuses peuvent incliner le corps, former un cercle avec les bras ou fléchir les jambes pour exprimer des lignes différentes. Lorsqu’elles atteignent les conditions requises pour l’accomplissement exact des figures, c’est alors qu’elles expriment l’élégance de la danse chinoise. L’amplitude de la gestuelle dans la danse chinoise permet de dépeindre une gamme variée de personnages et de sentiments.


Il y a d’autres techniques importantes dans la danse chinoise comme le cercle, le tour, l’inclinaison et la flexion. Nous allons expliquer un peu ces techniques.


La flexion fait référence au fait qu’un danseur doit maintenir ses genoux légèrement fléchis, sinon il donnerait l’impression qu’il marche sur scène et il ne pourrait représenter aucun personnage. Ceci est un des détails que les danseurs doivent souvent mettre en pratique.


L’inclinaison signifie que la danseuse ne doit pas être immobile sur scène comme une statue. Son corps doit se mouvoir telle la tige d’une fleur de lotus qui se balance doucement avec la brise faisant apparaître la beauté naturelle du corps humain.


«Dans la Chine antique, lorsqu’une jeune fille voyait un homme, elle rougissait immédiatement. Alors elle se couvrait le visage de sa manche et baissait la tête. Ceci est l’élégance naturelle d’une dame chinoise. Avec les détails de ces mouvements corporels, le public connaîtra l’état d’esprit du danseur. Un danseur doit montrer courage et héroïsme dans ses mouvements et ses yeux doivent exprimer cet esprit-là. C’est seulement en incorporant l’esprit, l’élégance, la forme et le mouvement corporel qu’un danseur sera capable d’exprimer totalement le style et l’élégance uniques de la danse classique chinoise», nous dit Vina, en nous confiant que le secret d’une bonne interprétation ne réside pas seulement dans une bonne technique.


Comme pour d’autres arts en Chine, l’expression artistique de la danse ne s’est pas transmise de manière pédagogique comme en Occident. Autrement dit, il n’y avait pas d’académie ou d’institution spécialisée pour apprendre les techniques. Au cours des différentes périodes de l’histoire chinoise, c’étaient les guerriers qui réalisaient les danses qui étaient destinées soit pour le public ou pour l’empereur lui-même. Les danses se composaient de nombreuses gestuelles, tours et attaques accompagnés de techniques d’arts martiaux. Ce n’est par un hasard si l’idéogramme wu dans wu shu (art martial) se prononce de la même façon que l’idéogramme wu du mot wu dao (danse). Si l’idéogramme wu de wu shu est utilisé dans un contexte doux, alors cela signifie qu’on fait référence à la danse. Si l’idéogramme wu de wu dao est utilisé dans un contexte agressif, alors qu’il est fait référence ici aux arts martiaux.


Pour cette raison, les techniques avancées de la danse chinoise qui incluent des roues, des sauts, des tours sont plus difficiles à accomplir et requièrent une plus grande maîtrise technique que pour les ballets classiques. Aussi le fait de ne pas être encadré dans un enseignement systématique sauf dans les derniers temps, fait que la danse chinoise comprend beaucoup plus de possibilités de création que le ballet classique : elle inclut plus de mouvements et une origine qui remonte à 5 000 ans d’histoire, on peut raconter beaucoup de choses. «Ceci la différencie du ballet puisque ce dernier se base sur un nombre déterminé de mouvements, et si l’on sort de cette limite, ce n’est plus considéré comme du ballet. À l’inverse, la danse chinoise ne pose aucune limite quant aux mouvements. Le plus difficile est de parvenir à la perfection de la technique et à l’état mental propre à transmettre tout le message de l’esprit dans un seul mouvement», poursuit Vina.


Le composant Yun

Entre la danse chinoise et le ballet classique, il y a encore une autre différence qui ne concerne pas seulement les techniques, mais quelque chose de plus profond, que les Chinois appellent yun. Ce yun correspond à une caractéristique culturelle innée, particulière à chaque ethnie, comme si l’hérédité culturelle s’était imprégnée dans nos gènes. Ceci est un autre reflet de la mentalité chinoise selon lequel corps et esprit ne font qu’un ; ce yun est le reflet de l’ethnie d’une personne dans sa gestuelle et son caractère. Ce point n’est pas connu en Occident. Voilà pourquoi ce yun ne peut pas être appris car il provient de l’héritage historique et culturel de l’ethnie tel un lien qui relie les hommes à travers l’histoire.


Malheureusement, ces concepts essentiels se sont perdus de nos jours en Chine, et plus particulièrement depuis le mouvement communiste de la révolution culturelle des années 60, où tous les concepts culturels traditionnels ont été bannis. Cela a eu pour conséquence que la production artistique des 50 dernières années en Chine a perdu sa signification profonde.


«Nous voulons montrer au public les valeurs traditionnelles de la culture chinoise, la noblesse, la droiture et la dignité», commente Vina.


Reconnaître le yun que l’on a en nous est essentiel pour que nous puissions nous rappeler qui nous sommes vraiment. L’art peut nous aider à nous en souvenir, et c’est un des rôles joué par la danse classique chinoise.

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