Wall Street Journal : Falun Gong fait le procès de Hong Kong

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Par JOHN LI

Dans le sillage du retour de Hong Kong à la Chine, l'éditorialiste anglais Michael Bachman, dans son livre "Asian Eclipse: exposer le côté sombre du business en Asie", se plaint de ce que la position de Hong Kong ne soit pas différente de celle de la grenouille ébouillantée du proverbe: jetée dans l'eau chaude elle saute au-dehors; jetée dans l'eau froide et chauffée lentement, elle y restera! Cette analogie convient aux nombreuses personnes concernées par l'avenir de Hong Kong, telle que John Tkacik, chercheur universitaire à l' Heritage. Dans un article du 28 juin publié dans ces colonnes, " Un pays deux systèmes, ne marche pas", il observait que même si les prédictions les plus pessimistes sur l'avenir de Hong Kong doivent encore se vérifier, " il y a des signes avant-coureurs inquiétants" .

Jamais Pékin ne serait assez stupide pour jeter ouvertement Hong Kong dans l'eau chaude car le monde entier pousserait des cris de protestation. Au lieu de cela, on a laissé Hong Kong vaquer à ses propres affaires pour ce qui touche ses activités quotidiennes de place économique de premier rang. Mais la chaleur est toujours enclenchée, et le régime du chauffe-eau de Pékin continue de grimper graduellement, avec lenteur et prudence.

C'est un chauffe-eau au design unique puisque des noms plutôt que des températures y sont gravés. Le premier cran a été Martin Lee et les autres activistes pro-démocrates, bouillants alliés des réformes politiques entreprises par Chris Patten, le dernier gouverneur britannique. En raison de leur sympathie vis à vis des victimes du massacre du 4 juin à Tiananmen et de leurs efforts pour continuer le processus de démocratisation à Hong Kong, ils ont été attaqués férocement par Pékin et plusieurs d'entre eux, dont Mr. Lee, se sont vus refuser l'entrée sur le territoire continental.

Ensuite, Anson Chan, une femme charismatique, ex- numéro deux du gouvernement de Hong Kong, connue en général comme "la conscience de Hong Kong" à cause de sa volonté de prendre la défense de l'autonomie territoriale a été obligée, sous la pression de Pékin, de prendre une retraite anticipée. Son départ a signifié le retrait de ceux qui avaient dirigé Hong Kong du temps de la colonie anglaise. Avec eux est parti le sens de la responsabilité que le gouvernement montrait habituellement envers sa population. Comme on l'a fait observé dans l'éditorial du 28 juin publié dans ces colonnes et intitulé "Le gouvernement incapable de Hong Kong", l'élite pro-Pékin qui a les a remplacés -avec à sa tête Tung Chee Hwa, le Chef de l'Exécutif - "a montré un empressement excessif à prouver sa fidélité à l'égard de Pékin, et a ainsi essayé d'anticiper ses désirs plutôt que d'agir au mieux des intérêts de Hong Kong."
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Dans ces circonstances, cela n'a pas été une surprise de voir Harry Wu, le défenseur de longue date des droits de l'homme être le prochain nom sur le cadran. M. Wu a été empêché d'entrer à Hong Kong en avril et son visa pour une visite au mois de juin lui a été refusé.

Maintenant le cadran a déjà un nouveau nom, personnifié par le Falun Gong, une autre épine dans le flanc des dirigeants chinois. Dans une manœuvre typique d'un régime communiste, Pékin a banni le Falun Gong en juillet 1999 quand le Président Jiang Zemin et une poignée de dirigeants haut-placés se sont sentis défiés par la popularité de ce mouvement spirituel dont le développement en Chine avait été très rapide. La plupart des pays démocratiques ont condamné la persécution qui a suivi. Mais Hong Kong s'est retrouvée déchirée entre, d'une part être en accord avec ses maîtres à Pékin au détriment de la formule abondamment ressassée par les médias, "un pays, deux systèmes", et d'autre part offenser M. Jiang en suivant les autres démocraties qui soutiennent les droits de l'homme des pratiquants du Falun Gong.

Jusqu'à récemment, Hong Kong a tenu bon, permettant au Falun Gong de poursuivre ses activités sur le territoire sans interférence, bien que des pratiquants étrangers qui tentaient de les rejoindre aient été souvent refoulés à l'aéroport. Cependant les choses ont mal tourné lorsque quatre pratiquants suisses de Falun Gong ont réussi au début de l'année à passer au travers des formalités d'immigration de Hong Kong et ont rejoint un sit-in protestataire à l'extérieur de l'Office de liaison de Pékin. Ils ont été arrêtés avec 12 pratiquants de Falun Gong de Hong Kong par la police locale et poursuivis en justice par le Département de Justice de Hong Kong sous l'accusation d'obstruction.

Leur procès n'a retenu relativement que peu d'attention parmi les gens de Hong Kong, beaucoup se sont laissés endormir, bercés par la chaleur comme la grenouille du proverbe. Mais il a été suivi avec beaucoup plus d'intérêt à Taiwan et en Occident où le Falun Gong est considéré comme une mise à l'épreuve de la survie de l'autonomie de Hong Kong sous l'égide "un pays, deux systèmes". Les remarques passées de M. Tung, quand il a appelé l'an dernier Falun Gong un ….. ( terme calomnieux utilisé par le régime de Jiang), rappelaient étrangement la position de Pékin sur cette question. Son gouvernement a ainsi commencé à préparer une nouvelle loi contre la trahison, la sécession, la sédition et la subversion, selon les directives établies par la "Basic Law" promulgée par Pékin, la constitution de Hong Kong, dont beaucoup craignent qu'elle entrave les activités du Falun Gong et les activistes démocrates. Dans de telles circonstances, peu de gens ont été surpris lorsqu'un tribunal de Hong Kong a déclaré coupable l'ensemble des 16 pratiquants de Falun Gong le 15 août dernier.
Le procès des membres du Falun Gong a mis Hong Kong en procès. Ce qui est en jeu n'est pas tellement le Falun Gong en lui-même mais plutôt la propre identité de Hong Kong; et le verdict porte davantage sur l'avenir de Hong Kong que sur ces 16 pratiquants. Bien que les amendes imposées aient été minimales, se montant pour chacun à seulement quelques centaines de dollars hong kongais - elles ont été mystérieusement payées par un donateur inconnu, évitant ainsi aux 16 d'aller en prison pour avoir refusé de les payer - un dommage durable a été fait à la réputation de Hong Kong.

Le verdict qui a reconnu les membres de Falun Gong coupables est un rappel que la vie à Hong Kong devient toujours plus chaude pour la jadis adorable grenouille de Hong Kong -- le symbole de son économie de marché éclatante -- et qu'on s'approche d'un pas de plus de la mort.

M.Li est un écrivain indépendant de New York, spécialisé dans les relation sino-américaines.


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