The Guardian : Ne vous y trompez pas – La Chine n’est pas blanche comme neige

Sous un aspect au moins, les dirigeants de la République Populaire de Chine se sont montrés étonnamment victorieux. Après avoir abattu des milliers de civils sans défense en 1989 , le gouvernement Chinois a réussi à devenir de nouveau totalement respectable. Aucun des meurtriers n’a jamais été appelé à rendre des comptes. C’est toujours le même gouvernement répressif. Son bilan en matière de droits de l’homme est toujours effroyable. Tous les défis potentiels à son monopole sur le pouvoir ont été écrasés. Et ce qu’a jamais été là-bas la pression étrangère a été supprimée. C’est comme si Tiananmen ne s’était jamais produit. [...]

[...] Que devrait on faire des fameux architectes d’Europe, des Etat-Unis et du Japon en compétition pour construire un nouveau quartier général de la CCTV, la compagnie de télévision d’état ? La compétition a eu lieu la semaine dernière. Parmi ceux qui ont rivalisé pour le projet de 600m $, des sommités comme Rem Koolhaas, Dominique Perrault, Toyo Ito, et les spécialistes des gratte-ciels New-Yorkais SOM. Le nom du gagnant sera annoncé le mois prochain.

Les compétitions architecturales ne sont pas une nouveauté en Chine. Il y en a eu une il n’y a pas longtemps pour l’opéra de Beijing. Depuis que le gouvernement a adopté la politique de raser l’ancienne capitale et d’en construire à la place une toute neuve, plus grande, à une échelle plus grandiose, il y a de quoi faire pour les architectes. Selon la plupart des projections, seulement une fraction de la Beijing des années 1970 demeurera en 2008. A moins d’être de l’opinion que toutes les affaires avec la Chine sont mauvaises, il n’y a rien de répréhensible à construire un opéra à Beijing, ni bien sûr un hôtel, un hôpital, une université ou même les quartiers généraux des affaires. Mais la télévision d’état c’est autre chose. CCTV est la voix du parti, le centre de la propagande d’état, l’organe qui dit à un milliard de gens quoi penser.

Maintenant il est vrai que les architectes sont souvent attirés par le pouvoir. Le Corbusier essayait d’intéresser le régime de Vichy et Staline à ses projets. Philip Johnson était quelque peu une chemise noire amateur. Avant de quitter l’Allemagne, Walter Gropius et Mies van der Rohe étaient très proches des Nazis. On peut voir pourquoi. Pour construire à une grande échelle vous avez besoin d’autorité et de beaucoup d’argent. Et les architectes aux dispositions utopiques, qui rêvent de transformer pas seulement la ligne d’horizon , mais notre manière de vivre, sont des surgeons naturels pour le totalitarisme. Et, en fait, des surgeons pour l’excès capitaliste. Tout dépend du client.

Il y a, néanmoins, des limites. Il est dur d’imaginer un architecte cool Européen dans les années 1970 construisant une station de télévision pour le Général Pinochet sans perdre une bonne part de sa crédibilité populaire. Et s’il est peut-être cool d’être anti-Américain, je ne peux pas imaginer un Koolhass, disons , ou un Perrault vouloir construire une station de télévision pour Saddam Hussein. Alors qu’est-ce qui fait que c’est OK pour la Chine ? Présumons que ça n’est pas la simple avidité ou le désir de pouvoir.

Une chose est la nature de la propagande Chinoise, qui affiche un socialisme et un nationalisme du tiers monde pour la forme. Yahoo ! parmi d’autres fournisseurs occidentaux de logiciels, vient juste d’accepter d’obéir aux règles de la censure Chinoise. La Compagnie américaine aidera a fournir un réseau Chinois, qui encourage « la bonne moralité et une civilisation traditionnelle Chinoise ». Tout ce que le gouvernement considère comme hostile à ces bonnes choses sera censuré. Ainsi de gros dollars peuvent être gentiment équarris avec une conscience sans tâche. Qui n’est pas en faveur de la civilisation traditionnelle Chinoise, ou la bonne moralité ?

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Tous ces arguments sont à moitié vrais, mais contiennent un énorme mensonge. La Chine n’est pas le moins du monde une société socialiste. Elle est en fait, un des pays le plus à droite, plus même que le Chili sous Pinochet, où il y avait encore des poches d’activité organisées échappant au contrôle de la junte. La Chine a maintenant un grossier capitalisme, mais pas de syndicats indépendants, encore moins de partis politiques.

Tandis qu’à l’occasion ils profèrent encore quelques slogans Marxistes, les boss du parti opèrent comme des chefs exécutifs corrompus, distribuant de l’argent au compte goutte, des concessions et des franchises aux copains, aux membres de leurs familles et à leurs laquais en faveur.

Il y a des bénéfices, c’est sûr. Les affaires dans les grandes villes côtières sont florissantes. Ceux qui savent comment opérer dans le casino du capitalisme Chinois s’enrichissent. La classe moyenne urbaine éduquée se porte bien. Mais un grand nombre de travailleurs et de paysans sont exploités, rejetés sans travail ou obligés de quitter leurs maisons. A la place de la libre expression et de la démocratie, il y a la propagande. Voilà à quoi sert CCTV. Et ce que nos architectes aident à préserver. Ce n’est pas une noble entreprise.