The Weekly Standard : La sordide moisson d’organes de la Chine (2)

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Le vrai problème c’est que les accusations venaient du Falun Gong – toujours l’enfant mal aimé de la communauté dissidente. A la différence des leaders étudiants de Tiananmen et d’autres prisonniers de conscience chinois qui se sont établis dans leur exil occidental, Falun Gong a marché au son d’un autre tambour chinois. Avec ses racines dans une tradition spirituelle du cœur de la Chine, Falun Gong n’aurait jamais construit une Statue de la Liberté et paradé autour pour CNN. En fait, pour des observateurs étrangers, les relations publiques du Falun Gong véhiculaient un peu de la culture grossière du Parti communiste : une perception que les pratiquants tendaient à exagérer, pour créer des tableaux de torture directement sortis d’un opéra de la Révolution culturelle, et lançant des slogans plutôt que des faits.

Pour différentes raisons, certaines valides, d’autres honteuses, la crédibilité des réfugiés persécutés a souvent été mise en doute en Occident. En 1939, un fonctionnaire des affaires étrangères britanniques parlant pour la majorité, décrivait les juifs, comme des témoins peut-être pas entièrement fiables. Durant le Grand Bond en avant, des réfugiés émaciés de Chine continentale se sont déversés à Hong Kong, se plaignant de villages désertés et de cannibalisme. Les journalistes occidentaux modérés ont ignoré ces récits comme subjectifs et biaisés.

Les plaintes d’un adepte d’un renouveau spirituel comptent apparemment encore moins que le témoignage d’un paysan ou d’un juif. Par conséquent, lorsque Falun Gong a révélé que l’épouse d’un médecin déclarait que son mari, un chirurgien, avait prélevé des milliers de cornées sur des pratiquants dans un hôpital du Nord est de la Chine du nom de Sujiatun, l’allégation a rencontré un scepticisme prudent de la communauté dissidente et un silence presque total de la presse occidentale (à l’exception de ce magazine et du National Review).

Alors qu’un comité du Falun Gong se lançait dans un mode pleinement investigateur, les avocats canadiens Kilgour et Matas ont compilé une accumulation de témoignages dans leur rapport. Cela incluait des transcriptions d’appels téléphoniques enregistrés dans lesquels des médecins chinois confirmaient que leurs donneurs d’organes étaient jeunes, sains et pratiquaient le Falun Gong ; un témoignage écrit d’ expériences de pratiquants de Chine continentale en détention , une explosion de l’activité de transplantation d’organes coïncidant avec un accroissement du nombre d’incarcérations de pratiquants du Falun Gong - des clients internationaux attendant pas plus d’une semaine pour un tissus compatible (dans la plupart des pays, les patients attendaient plus d’un an). Finalement, Kilgour et Matas ont comparé le nombre d’exécutions en Chine (essentiellement constant, selon Amnesty International) et le nombre de transplantations. Cela laissait un écart de 41.500 cas inexpliqués sur une période de cinq ans.

Ce rapport n’a jamais été réfuté point par point, pourtant la vaste majorité des activistes des droits de l’homme ont gardé leur distance. Puisque les allégations du Falun Gong étaient suspectes, les assertions de leurs alliés étaient suspectes. Les médecins de la transplantation ayant déclaré avoir des donneurs du Falun Gong dans leur sous-sol ? Ils disaient juste ce que les potentiels récipiendaires d’organes voulaient entendre. Les témoignages écrits des pratiquants ? Ils avaient été mis au point par des activistes. La hausse de l’activité de transplantation d’organes ? Peut-être était-elle simplement mieux rapportée. L’écart entre les exécutions et les transplantations ? Comme me l’a demandé un érudit des droits de l’homme respecté, pourquoi Kilgour et Matas utilisent-ils l’estimation du nombre d’exécutions en Chine d’Amnesty International pour suggérer que le taux d’exécutions est demeuré constant pendant dix ans ? Même Amnesty reconnaît que leurs chiffres peuvent représenter une grossière sous-évaluation. Peut-être qu’il n’y a pas d’écart du tout.

Finalement, pourquoi aucun véritable témoin, un médecin ou une infirmière qui avaient réellement opéré des pratiquants de Falun Gong, ne s’était présenté ? Sans une telle preuve (bien que la crédibilité d’un tel individu puisse toujours être mise à mal, même avec des documents la soutenant), les défenseurs des droits de l’homme ont prétendu qu’il n’y avait pas de raison de prendre l’histoire au sérieux. Il n’y avait certainement pas de raisons suffisantes pour que le Président Bush mentionne le prélèvement d’organes dans son discours de droits de l’homme à la veille des Jeux Olympiques.

Les critiques avaient soulevé des points de discussion légitimes. Mais aussi le gouvernement chinois : suite à leur toute nouvelle admission en 2005 que des organes étaient prélevés sur des prisonniers condamnés à mort ordinaires, et après avoir émis leurs dénis prévisibles de prélèvement d’organes du Falun Gong, Pékin a soudainement passé une loi en juillet 2006 interdisant la vente d’organes sans consentement du donneur.

Trois choses se sont produites. L’approvisionnement en organes s’est resserré. Les prix ont doublé. Et les transplantations ont continué. Donc à moins qu’il y ait eu un changement culturel radical depuis 2004, lorsqu’un reportage chinois a trouvé qu’1.5 pour cents seulement des reins transplantés étaient des donations de proches, les organes en vente doivent quand même provenir de quelque part. Assumons de ses prisonniers – c’est ce que pensent les médecins taiwanais – et théorisons que la nouvelle loi était un signal : Obtenez vos formulaires de consentement et cessez de récolter les organes du Falun Gong. Pour l’instant.

Et les critiques disaient une chose juste : la précision est une illusion. Aucune conversation enregistrée avec un docteur du continent n’est hors de doute. Tous les témoins de Chine ont des motifs divers, toujours. Et, là encore, aucun nombre venant de Chine, même celui du dernier paragraphe ne peut être considéré comme définitif.

En fait, toute l’investigation doit être comprise comme en étant encore à sa première, je dirais même primitive, étape. Nous ne connaissons pas vraiment l’échelle de ce qui est en train de se produire. Pensez à 1820, lorsqu’une poignée de médecins, de scientifiques et de chasseurs de fossiles amateurs essayaient de tirer un sens de preuves suggestives éparpillées et d’une pile d’os incohérents. Vingt deux ans allaient passer avant qu’un paléontologue anglais en vienne à inventer le terme "dinosaure " - " terrible lézard " – et l’étude moderne de ces créatures disparues a connu une sérieuse avancée. Ceux d’entre nous qui faisons une recherche sur la récolte d’organes issus de donneurs non consentants en Chine sommes comme les premiers chasseurs de dinosaures. Nous ne travaillons pas en étroite consultation mutuelle. Nous sommes encore en train d’attendre que ne serait-ce qu’un médecin ayant récolté des organes de prisonniers de conscience encore vivants émerge de Chine continentale. Jusque là, nous n’avons même pas d’os de dinosaures. Mais nous avons des indices. En voici quelques uns que j’ai trouvés.

Qu Yangyao, une professionnelle chinoise s’exprimant avec aisance, a trois diplômes de maîtrises. Elle est aussi la première réfugiée à décrire un examen des " seuls organes". Qu s’est enfuie à Sydney l’an dernier. Étant prisonnière en Chine en juin 2000, elle a refusé de se « transformer » en signant une déclaration rejetant le Falun Gong – et a finalement été transférée dans un camp de travail. La santé de Qu était tout à fait bonne, bien qu’elle ait perdu du poids suite à des grèves de la faim. Étant donné le statut de Qu et son niveau d’éducation, il y avait de bonnes raisons de la garder en bonne santé. La police chinoise voulait éviter les morts en détention – moins de paperasses, moins de questions. Du moins, c’est ce que Qu a assumé.

Qu avait 35 ans lorsque la police l”a escortée avec deux autres pratiquantes dans un hôpital. Qu se rappelle distinctement la prise d’un grand volume de sang, puis d’un rayon X de la poitrine, et d’une sonde. " Je n’étais pas sûre de quoi il retournait. Ils vous touchent simplement à différents endroits … l’abdomen, le foie." Elle ne se souvient pas avoir donné d'échantillon d’urine à ce moment, mais les médecins lui ont envoyé une lumière éblouissante dans les yeux, examinant ses cornées.

Le médecin lui a-t-il demandé de suivre le mouvement de la lumière qu’il lui envoyait dans les yeux, ou a-t-il contrôlé sa vision périphérique ? Non, il a juste examiné ses cornées, éludant tout examen impliquant la fonction cérébrale. Et c’est tout : pas de marteau sur les genoux, pas de toucher des ganglions lymphatiques, pas d’examen des oreilles, de la bouche ou de l’appareil génital – les médecins ont examiné ses organes au détail et rien d’autre.

J’ai du ressentir un frisson silencieux me parcourir le dos à certains moments de notre entretien, mais Qu comme de nombreux sujets éduqués, ne semblait initialement pas consciente des implications potentielles de ce qu’elle me racontait. De nombreux prisonniers gardent une sensibilité du genre " ça ne peut pas arriver ici. " "Je suis trop importante pour être éradiquée" est le mantra des survivants. Dans la majorité des interviews présentées ici, mes sujets, bien que conscients de la question de la collecte d’organes, n’avaient pas d’idée claire de ma ligne de questionnement ou des réponses " appropriées ".

Les pratiquants de Falun Gong ne doivent pas mentir. Ça ne signifie pas qu’ils ne le font jamais. Au cours de mes interviews j’ai entendu quelques distorsions. Non pas que les gens s’y fussent " préparés ", mais parce qu’ils ont souffert un traumatisme. Les distorsions délibérées, cependant, sont extrêmement rares. La meilleure façon de se garder des faux témoignages est de se baser sur des interviews assises prolongées.

En tout, j’ai interviewé 15 réfugiés du Falun Gong de camps de travail ou de détention prolongée qui avaient expérimenté quelque chose d’inexplicable dans un établissement médical. Mon assistant de recherche, Leeshai Lemish, a interviewé Dai Ying en Norvège, amenant le total à 16. Si ce nombre semble peu, considérez la difficulté de survie et de fuite. Même ainsi, à peine plus de la moitié des sujets peuvent être déterminés comme des candidats sérieux pour le prélèvement d’organes : trop vieux, trop physiquement abîmés par le travail, ou trop émaciés suite aux grèves de la faim. Certains étaient simplement trop hésitants dans leur souvenir de procédures spécifiques pour nous être d’une quelconque aide. Certains ont été soumis à des tests médicamenteux. Certains ont eu des examens physiques complets apparemment normaux, bien que de telles personnes aient parfois fourni des indices valables.

(à suivre)

Traduit de l’anglais de :
http://www.weeklystandard.com/Content/Public/Articles/000/000/015/824qbcjr.asp

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