Des Jeux Olympiques indignes
Est-ce qu’on se souviendra des Jeux Olympiques 2008 comme d’un blanchiment de la tyrannie et de la souffrance, un remake de Berlin 1936 ? Edward McMillan Scott, éminent parlementaire européen, ne craint pas de parler après une investigation clandestine des violations des droits de l’homme en Chine. Ceux qui ont été interviewés ont enduré des représailles : Un individu a depuis été condamné à cinq ans de prison pour avoir « perturbé l’ordre social, » et la femme d’un autre a été battue jusqu’au coma.
Pékin se prépare à accueillir les Jeux Olympiques, mais si ce que m’a dit récemment là bas un ancien prisonnier est vrai, le monde civilisé devrait fuir la Chine.
Dans une chambre d’hôtel défraîchie aux rideaux tirés, les hommes que j’ai rencontrés m’ont parlé de la persécution brutale de leur mouvement spirituel et bien pire, de la vente d’organes vivants, sur commande. De même que mon interprète, ces hommes ont été rapidement arrêtés, détenus et interrogés pour le « crime » de m’avoir rencontré. Un pratiquant a disparu et on craint qu’il ne soit torturé.
Quelques jours avant l’anniversaire du massacre de la Place Tiananmen – le 4 juin – je me suis rendu à Pékin afin de mettre le doigt sur un nouveau développement terrifiant : des rapports de ‘collecte d’organes’. Des organes de prisonniers sont littéralement commercialisés, le temps d’attente pour une transplantation n’étant souvent qu’une affaire de jours. Près de 400 hôpitaux en Chine se partagent le commerce en plein essor des greffes, des sites internet faisant la publicité pour de nouveaux reins pour $60 000. Les administrateurs répondent aux demandeurs : « Oui, c’en est un du Falun Gong, donc il sera impeccable. »
En tant que fondateur de l’initiative de l’Union européenne pour la démocratie et les droits de l’homme, j’ai voulu découvrir pourquoi le régime communiste qui domine le plus grand pays du monde depuis 1949 en était arrivé aujourd’hui à commettre un génocide.
En 1992, le Falun Gong, un nouveau mouvement de style Tai chi – avait commencé à balayer la Chine. Lorsque je suis allé pour la première fois à Pékin en 1996, chaque espace ouvert était plein de gens pratiquant ses exercices et sa méditation. En 1999, il comptait à peu près cent millions d’adhérents. Du fait de son auto discipline et de son approche saine - les pratiquants ne fument pas et ne boivent pas d’alcool et ont un rigoureux code moral – il était encouragé par les autorités.
Puis, en 1999, le régime a décidé que Falun Gong pouvait devenir une force organisée et a lancé une répression brutale, organisée par son notoire Bureau 610, nommé d’après la date de sa fondation. J’avais entendu dire que les pratiquants étaient brutalement traités et que la persécution par d’autres prisonniers était encouragée, mais ce sont les rapports de transplantation d’organes de prisonniers vivants, une affreuse récompense pour leur style de vie sain – qui mont décidé à me rendre en Chine.
Niu Jinping, 52 ans et sa petite fille de deux ans étaient assis sur le lit d’hôtel en face de moi. Niu avait purgé deux ans en prison pour sa pratique du Falun Gong et son épouse était encore emprisonnée." La dernière fois que je l’ai vue, en janvier, elle avait le corps entier tuméfié suite aux coups répétés de ses bourreaux pour la faire renoncer au Falun Gong. Elle est sourde aujourd’hui." Niu était désespéré : les coups endurés par sa femme ont duré une vingtaine d’heures. Il m’a dit que trente parmi les pratiquants de Falun Gong dans sa prison étaient mort suite aux coups. Lorsque la répression a commencé, Niu a perdu son permis de travail et a du vendre sa maison pour survivre. Il gagne à peu près $ 90 par mois en gardant les voitures d’un nouveau riche de Chine.Y avait-il quoique ce soit de séditieux à propos du Falun Gong, quelque chose de dangereux pour le régime ? Non a répondu Niu d’un air triste.
Falun Gong n’est pas une organisation d’adhérents et ne prend pas de frais d’inscription. En réponse à la répression, les pratiquants ont entrepris une pacifique campagne de « vérité » contre le régime qui a à ce jour suscité plus de vingt millions de démissions du Parti communiste et de ses affiliations.
Selon les nombreux diplomates, journalistes et autres observateurs que j’ai rencontrés, ce n’est pas seulement Falun Gong mais d’autres bouddhistes, en particulier des Tibétains, des Chrétiens et des musulmans, qui sont aussi persécutés. Malheureusement, le vaste essor économique de la Chine fait que ces mêmes diplomates et visiteurs détournent leurs regards officiels des centaines de milliers de personnes en « détention administrative ».
Un homme a osé parlé, c’est l’avocat des droits de l’homme Gao Zhisheng. Son cabinet à Pékin acceptait les cas de personnes désespérées jusqu’à ce que les autorités le mettent sous arrestation à domicile en février : Il avait conseillé Niu Jinping. Gao, un chrétien, m’a dit que j’étais le seul politicien à avoir, en sept ans, rencontré d’ex prisonniers du Falun Gong en Chine, et critiqué l’hypocrisie des diplomates occidentaux.
L’autre ex-condamné que j’ai interviewé était Cao Dong, 36 ans, qui avait été en prison avec sept manifestants place Tiananmen et a raconté la même histoire. Des larmes dans les yeux, il m’a dit qu’il avait vu le cadavre d’un de ses amis – lui aussi pratiquant de Falun Gong – avec des trous où les organes avaient été prélevés. Je viens juste d’apprendre que la police secrète a utilisé sa clé d’appartement pour saisir son matériel informatique et des papiers privés. Ils avaient déjà interrogé pendant cinq jours celui avec qui il partageait son appartement : Il se cache à présent, tandis que Cao Dong a disparu depuis l’interview. J’ai demandé une rencontre urgente avec l’Ambassadeur chinois auprès de l’Union européenne. Si certains à Pékin pensent que c’est la façon de préparer les Jeux Olympiques, ils ont fait le mauvais numéro.
Edward McMillan Scott, MEP, (Yorkshire& Humber, Cons) est un Vice Président du Parlement européen.
(l'article a été originellement publié en anglais dans le numéro 6 du magazine Compassion)
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