Globe and Mail (Canada) : Les Chinois ferment les yeux sur des choses qui ont lieu juste sous leurs nez

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Le 7 août 2008

PÉKIN -- Il y a eu un échange hier, dans un petit restaurant de boulettes dans le district défavorisé de Daxing dans la partie sud de cette immense ville, mettant le doigt sur la dichotomie déstabilisante qui semble tellement faire partie du mode de vie chinois.

J'ai essayé de suivre le soi-disant « Circuit guidé de la persécution du Falun Gong à Pékin » à l’usage des journalistes lequel, à pieds, dans cette ville immense et stimulante, peut prendre des jours voire des semaines, et j'ai cherché la Prison municipale de Pékin pour femmes, où au moins quelques unes des récentes détenues du Falun Gong sont croit-on incarcérées. Elles sont en prison, mais comme il s'agit de la Chine, il n'est pas toujours facile de déterminer dans laquelle.

Daxing semble-t-il est aussi célèbre pour ses prisons que pour ses pastèques et lorsque mon interprète a demandé à un homme qui mangeait à une table en face de nous, où était située la prison municipale pour femmes, il a souri et a haussé les épaules. « Il y a beaucoup de prisons ici. »

C'était la même histoire dans le taxi en direction de Daxing. Le chauffeur ou l'interprète s'arrêtait et demandait la direction, ne donnant que le nom de la route; si ça ne marchait pas, et c'est ce qui se passait le plus souvent compte tenu de la taille la ville et de la vitesse à laquelle elle change, on peut vivre toute une vie ici et n'en pas connaître le dixième; ils mentionnaient un certain camp de « ré-éducation » ou un centre de détention particulier et tout à coup les directions étaient données à toute vitesse.

En d'autres mots, tout le monde ici connaît ou suspecte au moins un peu ce qui se a lieu sous leur nez- - comme la plupart d'entre nous qui venons ici en tant que visiteurs -- mais la plupart ne cherchent pas à en savoir plus.

Quand c'est inconfortable, ou mauvais pour les affaires, ou franchement dangereux de reconnaître même les faits essentiels de votre propre existence, peu de gens le feront. Comme l'ancien chef du Bureau du Washington Post à Pékin conclut à regret dans son nouveau livre, « Out of Mao's Shadow [Hors de l'ombre de Mao] ». « La pénible vérité … est que beaucoup de gens ne regardent même pas et que le Parti communiste gagne la bataille pour l'avenir de la nation. »

Et le Parti gagne, dit M. Pan, parce que l'économie galopante a vraiment amélioré la vie de beaucoup de gens; parce que la classe entreprenante en plein essor, de qui on aurait pu attendre, normalement , avec plus de temps libre qu'elle réclame davantage de démocratie, s'est enrichie parce que le Parti l'a permis, car la propagande fonctionne; mais aussi parce que, de dire M.Pan : « Le gouvernement est devenu expert à manipuler l'opinion publique, en particulier à rallier des sentiments nationalistes à ses côtés. »

Ainsi, le spectacle olympique, en plein épanouissement, maintenant que le Relais de la flamme (qui a vu beaucoup de Chinois réagir avec colère, ou tout au moins enorgueillis de fierté nationaliste, face aux protestations du pro-Thibet qui ont accompagné la première étape) est arrivé dans la capitale.

Pékin est, dans les secteurs olympiques et ses environs, tellement nouveau qu'il crisse.

L'aéroport est nouveau et énorme. Les superautoroutes qui y mènent sont nouvelles et comparativement vides. La verdure abondante - arbres, fleurs, arbustes, pelouses et même petits pots astucieux de plantes aux cabines de péages et sorties - - est toute nouvelle, et vous pouvez le constater parce que quand vous éloignez suffisamment des sites olympiques qui en mettent plein la vue, et que vous voyez les arbres et les plantes qui ne datent pas d'hier, ils sont recouverts d'une couche permanente de poussière et paraissent gris-vert.

Les bâtiments, que ce soit des appartements ou des tours de bureaux , sont neufs et éclatants; les stades olympiques sont plus grands que la réalité et inspirent l'émerveillement. Tout, du transport d'autobus jusqu'aux toilettes publiques semble fonctionner avec la plus grande efficacité. Il y a partout des groupes de jeune chinois du personnel gais, superbes et serviables ; c'est comme si, il y a des décennies les « Épouses de Stepford » étaient sorties du mauvais film dans lequel elles jouaient , et étaient arrivées ici pour engendrer une progéniture souriante, joyeuse et inconditionnelle . Les échanges entre Canadiens et Chinois sont particulièrement amusants puisque les gens, de ce qui sont probablement les deux pays les plus polis et timides du monde entier, essaient de se dire l'un , l'autre, « Excusez-moi ».

Donc, tout cela va être grandiose de tellement de façons.

Mais, malgré que je n'aie jamais trouvé la Prison municipale de Pékin pour femmes, nous nous sommes arrêtés au centre de secours de Qinghe,( essentiellement un hôpital d'urgence connu sous le '999' ici), où la famille de Yu Zhou a été interpelée, tôt en février.

Le percussionniste de Pékin de 42 ans (vous devez surveiller ces percussionnistes ennuyeux) était, commodément, déjà mort, décédé pense-t-on durant une incarcération au centre de détention du district de Tongzhou. Lui et son épouse, poète et peintre, Xu Na ont été arrêtés en janvier, sur leur chemin de retour d'un concert. En dépit des demandes répétées d'autopsie venant de la famille, le site Internet d'information sur le Falun Gong indique qu'ils n'ont même jamais reçu son corps, et que sa dépouille est toujours à l'hôpital pense-t-on. Son épouse sert une peine de 12 ans à la prison dans la prison que je n'ai pas pu trouver.

Nous sommes passés tout près d'un camp de « ré-éducation par le travail » et d'un centre de détention dans le secteur de Tuanhe du district de Daxing. L'interprète a demandé aux camarades à la porte si nous pouvions obtenir quelque information (nous avions convenu à l'avance de ne pas mentionner ce que l'interprète, avec un sourire ironique, a décrit comme le « mot F »), mais un fonctionnaire a déclaré que même pendant les Jeux Olympiques, la permission devait d'abord être donnée par écrit, par diverses autorités. C'est à ce centre de détention, je pense, qu'un autre pratiquant de Falun Gong , David (Dongwei) Bu, qui a été déclaré prisonnier de conscience par Amnesty International, est croit-on incarcéré.

Pour votre information, personne n'a jamais accusé les adeptes du Falun Gong, aussi connu sous le nom de Falun Dafa, d'être de violents radicaux. En effet, personne sauf le gouvernement chinois, qui après des années d'approbation de la pratique, en partie spirituelle en partie composée d'exercices physiques, et apolitique, les a accusés de guère plus.

Au Canada, comme dans une grande partie du monde occidental, le Falun Gong tient surtout de paisibles veillées silencieuses à l'extérieur des ambassades et des consulats chinois. Ce n'était que ce genre de protestations - - silencieuses, sans banderoles - -lorsqu'en avril 1999, 10 000 personnes se sont présentées devant le complexe du gouvernement du Parti communiste chinois; trois mois plus tard, le gouvernement chinois interdisait le groupe, rendant illégal d'y appartenir, et lançait sa répression brutale qui perdure jusqu'à ce jour. Des manifestations silencieuses, faire des exercices de respiration en public, être un peu bizarre. C'est suffisant ici.

Philip Pan termine son livre en disant lors de son premier voyage en Chine dans les années 90 , il croyait vraiment que la chute du pouvoir du Parti se profilait à l'horizon. Il ne le pense plus.

http://www.theglobeandmail.com/servlet/story/LAC.20080807.OLYBLATCHFORD07/EmailTPStory/Comment


Traduit de l'anglais au Canada le 8 août 2008

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