"L’Appel à Zhongnanhai" le 25 avril 1999 - Une excuse pour un génocide

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On se souvient de certains événements dans l'histoire comme d'étincelles déclenchant des événements plus grands. L'assassinat de Franz Ferdinand, archiduc d'Autriche, aboutissant à la Première Guerre mondiale, et l'arrivée au pouvoir de Mikhaïl Gorbatchev, conduisant finalement à l'effondrement de l'Union soviétique, n'en sont que deux exemples.


Parmi de tels événements il y a un tournant peu compris dans l'histoire chinoise récente- "L’appel de Zhongnanhai" du 25 avril 1999. Certains observateurs chinois considèrent l'événement comme étant le catalyseur d'une des répressions spirituelles les plus violentes de notre époque contemporaine.


Seulement sept ans avant l'appel de Zhongnanhai, M. Li Hongzhi, nominé depuis pour un Prix Nobel de la paix, a transmis la pratique spirituelle du Falun Gong au public. Falun Gong, une combinaison d'exercices, de méditation et de principes moraux, est rapidement devenu populaire dans toute la Chine. C'est cette popularité que le régime communiste chinois, connu pour avoir une tolérance zéro vis à vis de toute voix alternative, allait percevoir comme un dilemme.

Une protestation silencieuse

Zhongnanhai, le complexe du gouvernement central dans la capitale, Pékin, a été le site du premier appel public majeur des pratiquants de Falun Gong [Note du rédacteur : les pratiquants de Falun Gong sont allés faire appel au Bureau des Appels central, qui se trouve être près du complexe.] C'était aussi le plus grand rassemblement public spontané depuis le massacre de la place Tiananmen en 1989.


Sur la base de preuves vidéo, au moins 10.000 manifestants de Falun Gong se sont rassemblés devant Zhongnanhai afin de remettre une pétition aux dirigeants du Parti communiste - un taux de participation sans précédent, compte tenu des efforts du régime pour museler toute expression publique.


Les images capturées par les cameramen d’ABC montrent un rassemblement ordonné, les manifestants se tenant debout par rangées de plusieurs personnes, s'étendant sur deux kilomètres le long des trottoirs bordés d'arbres à côté de la Cité Interdite. Certains pratiquaient les exercices de Falun Gong, tandis que d'autres étaient assis ou lisaient. Cette manifestation silencieuse unique entendait d'une part regagner la reconnaissance officielle du Falun Gong par le régime communiste, et également pétitionner pour la libération des pratiquants de Falun Gong arrêtés dans la ville côtière de Tianjin;

Les éléments déclencheurs

Deux semaines auparavant, le périodique Youth Science and Technology Reader publiait un article de He Zuoxiu, connu pour son opposition aux pratiques alternatives. Le journal Ming Pao basé à Hong Kong a rapporté que He Zuoxiu - beau-frère de Luo Gan, le ministre de la Sécurité publique, qui allait être ultérieurement le fer de lance de la campagne anti-Falun Gong – diffamait la pratique en présentant une vision "déformée" de ses principes.


En réponse, un certain nombre de pratiquants de Falun Gong étaient allés au Bureau du Youth Science and Technology Reader demander aux éditeurs de retirer l'article erroné.


Le magazine a refusé et a appelé la police - en conséquence, 45 pratiquants ont été battus et détenus En réponse, les pratiquants locaux ont lancé un appel au gouvernement municipal de Tianjin qui les a redirigés vers le Bureau central d'appels à Pékin.


En 1999, le régime chinois estimait le nombre de pratiquants de Falun Gong à Pékin à entre 400 et 500.000 : le nombre dans l'ensemble du pays était estimé à de 70 à 100 millions.


Des reportages du Washington Post ont déclaré que la majorité des manifestants à Zhongnanhai était de Pékin. Cependant, certains avaient voyagé d'aussi loin que la province du Zhejiang, à plus de 1.000 kilomètres (621 miles) au sud de Pékin. Les principaux systèmes de transport menant à la capitale avaient reçu l’ordre de fermer.


Quand les manifestants sont arrivés à Zhongnanhai tôt dans la matinée, quelque 1.000 agents de la sécurité publique et des policiers en civil avaient déjà été déployés.


Bien que les craintes d'émeutes se soient avérées infondées, la police a refusé de laisser les pratiquants s’approcher du principal Bureau des Appels. En fait, ce sont les autorités qui les ont dirigés à un endroit opposé à Zhongnanhai qui semblait entourer le complexe. Cette tactique était un geste calculé utilisé afin d’accuser à tort les pratiquants de Falun Gong d’avoir "encerclé"le bâtiment .


Après des heures de négociations entre les manifestants et les fonctionnaires de Pékin, cinq représentants du groupe ont été invités à parler avec le Premier ministre Zhu Rongji. M. Zhu a rapidement donné l'ordre de libérer les pratiquants arrêtés à Tianjin et la foule s’est dispersée tranquillement entre 10h30 et 11 h30.

La persécution commence

En dépit de cette résolution, il y a eu des remous au sein du Bureau politique. Afin de consolider son pouvoir personnel, Jiang Zemin, alors chef du Parti communiste chinois, a illégalement proscrit la pratique trois mois plus tard, le 20 juillet 1999 ;


Ceci a marqué le début d’une campagne à l’échelle nationale pour calomnier et éliminer le Falun Gong. Les livres, vidéos et cassettes de Falun Gong ont été confisqués et détruits à grande échelle. Les sessions d’exercices dans les parcs publics étaient régulièrement harcelées, des témoins se souvenant de pratiquants soulevés par la police alors qu’ils étaient encore les jambes croisés en méditation et jetés à terre.


Des milliers de personnes ont été parquées dans des stades avant d’être transférées dans des camps de travail. Il n’y a eu aucuns jugements officiels; les morts de pratiquants de Falun Gong en détention étaient comptées comme "suicides."


Près de 4000 décès de pratiquants de Falun Gong sous les coups et la torture ont été vérifiés depuis 1999; cependant, des experts des droits humains en estiment le chiffre à au moins 10 000.


Une répression aussi draconienne a amené les observateurs à questionner les motifs derrière la persécution du Falun Gong.


Ce pourrait être pour des raisons historiques. Il reste encore au régime en Chine à admettre que le massacre de la place Tiananmen a eu lieu.En réalité, toute référence à l’assassinat mondialement dénoncé des étudiants pro-démocratie a été effacée des manuels scolaires de la Chine et l’accès en est bloqué sur l’Internet.


La célèbre séquence d’une silhouette solitaire essayant d’arrêter les tanks à Tiananmen sert de rappel des sacrifices que le peuple de Chine a du faire toutes ces années pour faire entendre sa voix.


Bien que l’identité du courageux étudiant n’ait jamais été confirmée, son message est intemporel. Peut-être que l’héritage de Zhongnaihai figurera un jour dans les livres d’histoires comme un événement donnant en exemple le courage et la dignité du peuple chinois.


[article initialement publié en avril 2016]

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